LES FOUS DU MANOIR D’ISTAPPOK
Qu’est-il arrivé à l’infirmière?
PERSONNAGE 1 :
Bonjour… bonjour… bonjour… bonjour !
Je sais je dis plusieurs fois BONJOUR BONJOUR BONJOUR BONJOUR, vous avez remarqué 4 BONJOUR BONJOUR BONJOUR BONJOUR à chaque fois.
Ce qui fait que je l’ai prononcé 12 fois depuis que je vous parle. Et j’ai prononcé 45 mots, 48 maintenant. 51.
Et y’a toujours un vieil ivrogne pour dire « pastis ». C’est comme ça que tout à commencé. A force de boire, c’est ici qu’on finit, chez les fous !
Enfermé dans une prison qui n’a même pas de barreau mais comme seules limites notre propre corps et notre cerveau conditionné par notre addiction à l’alcool.
Mais je suis pas fou, je sais très bien qu’on ne nous donne pas d’alcool ici au Manoir d’Istappok. Mais des boissons qui en ont le goût c’est tout !
Je sais que les docteurs nous mettent des médocs dans ces boissons… Ça en a aussi le goût !
Et tout est dégueulasse ici !
Même les rats de laboratoires sont mieux nourris que nous.
D’ailleurs, je pense qu’ils doivent nous surveiller toute la journée. Je sens qu’ils nous observent, je sens leurs regards se poser sur moi, même quand j’ai le dos tourné, je les sens me regarder.
Au fait, vous connaissez mon nom ? Je m’appelle Monsieur BONGOUR. Enfin je crois… Attendez… J’hésite… Euh… Oui c’est ça… Marcel Bongour. C’est simple. Simple comme BONGOUR. Vous n’avez pas vu l’infirmière aujourd’hui ? C’est étrange, elle passe toujours à cette heure-ci. Le plus qu’elle ait eu de retard c’était 6 minutes et 32 secondes. C’était il y a 1 an 3 mois et 16 jours. Je m’en souviens précisément. J’avais eu une double dose pour me calmer de ma crise qu’essayaient de contenir d’autres infirmiers.
Elle a déjà 1 minute et 18 secondes de retard. Parfois elle est en avance mais c’est rare. Le 18 octobre dernier, elle est venue avec 2 minutes et 37 secondes d’avance. Mais je lui ai dis d’attendre 2 minutes et trente secondes pour la prise de mon médicament. L’heure c’est l’heure. Et moi c’est Marcel. Marcel… Euh… Comment déjà ? Ah oui BONGOUR. C’est simple. C’est simple comme … comme 144 au carré est égale à 20736. Et simple comme racine carré de 144 est … 12… Bien, je vois qu’il y en a au moins un qui suit. Bon eh bien, elle est décidément en retard… C’est embêtant… Hier elle est arrivée très en retard déjà. 5 minutes et 46 secondes pour être précis. Je suis la première personne qu’elle vient voir quand elle commence son service et depuis toujours. C’est la règle. Je suis une personne importante c’est pour cela.
Je crois que je vais devoir m’allonger si je n’ai pas mon traitement dans la minute.
Allez chercher le docteur s’il vous plaît. Dites-lui que Marcel … euh… Marcel… Marcel… euh … Marcel BON… BONGOUR… Marcel Bongour a besoin de son traitement.
PERSONNAGE 2 DU MANOIR D’ISTAPPOK:
Euh bonjour… hum…Je suis le docteur si si… Ne riez pas c’est vrai ! Mais je ne suis pas le docteur Sissi… non non. Mais le docteur… oui oui. Mais ce n’est pas mon nom… non non. Vous avez bien compris ? Oui oui ?
Vous avez l’air perplexe ! Pour une histoire peu complexe.
Pour ne pas que ça vous vexe, je vais vous donner mon … nom. Vous voulez savoir mon nom ? Non ? Mais pour quoi faire ? Je suis le docteur Hissi.
Ici c’est moi le docteur.
Je connais tous les cas des patients qui sont enfermés dans cette asile. Beaucoup ne sont pas des fous à proprement parlé mais ont des pathologies sous-jacentes. On a dans cette asile que deux tarés profonds. Comme le confirme l’adage : 1 asile 2 fous !
Dès le premier contact, je détecte une pathologie psychiatrique chez mes patients. Quand je leur dis que je suis le docteur Hissi, ils font une drôle de tête, ils froncent les sourcils et ils me font croire, comme une évidence, qu’ils le savaient déjà.
Mais vous, saviez-vous que j’étais le docteur Hissi ?
Je ne porte pas de badge à mon nom pourtant. Mais pourquoi froncez-vous les sourcils ? Vous commencez à m’inquiéter ! Seriez-vous aussi atteints d’un quelconque trouble ?
Oui oui ou non non ?
Je consulte le matin, vous devriez venir me voir. Je pense que cela vous ferait du bien de parler. Je vous assure.
Vous n’êtes pas à l’abri que votre stress permanent déclenche un trouble obsessionnel compulsif ou bien une légère paranoïa ou encore un début de schizophrénie.
Mais rassurez-vous, je le garde pour moi.
Venez et demandez le docteur Hissi. Y’en a qu’un, c’est moi, c’est le docteur Hissi.
C’est facile de se rappeler, non ?
Mais ne venez pas demain. Je serai occupé. Je remplace l’infirmière depuis hier.
Bah oui, vous le savez ce qui est arrivé à cette pauvre infirmière… Non non ?
On l’a retrouvée ligotée dans un placard du couloir… Allez savoir qui a fait ça…
J’espère que cela lui aura remis les idées en place. Vous savez que je ne lui veux pas de mal mais elle ne m’écoute pas souvent. Elle n’administre pas les doses que je prescris aux patients. Nous nous disputons souvent.
Bah oui oui ! C’est comme ça !
Bon j’ai du travail maintenant.
N’oubliez pas, je suis le docteur Hissi! J’épelle pour ceux qui ont un trouble : H-I-S-S-I. Docteur Hissi.
A bientôt, mes futurs internés ! AHAHAHAHAHAH….
PERSONNAGE 3 :
Je suis André de la Roche-Ticot. Tout le monde me surnomme l’asticot. Je sais, je suis un as !
On m’a dit que je devais sortir aujourd’hui. Un taxi doit venir me chercher. Vous n’auriez pas vu un taxi dehors devant la porte ?
On m’a dit que j’étais guéri. C’est l’infirmière Isabella qui me l’a dit. Mais je ne la vois plus depuis deux jours. Elle est peut-être partie en vacances ? Mais d’habitude elle me le dit quand elle part. Peut-être, est-elle partie chercher elle-même le taxi ? Elle conduit certainement le taxi pour m’emmener en vacances avec elle. Nous devions partir ensemble.
Ne me dites pas qu’elle est partie sans moi !
C’est ça, vous me le cachez !
C’est elle qui vous envoie pour me dire qu’elle a décidé de rompre avec moi alors que je suis très amoureux d’elle.
Elle n’a même pas eu le courage de venir me l’annoncer elle-même !
Elle doit être loin désormais depuis deux jours, je ne la rattraperai jamais.
Alors c’est à vous que je vais casser la gueule. Il faut que je me défoule…
Ahhhhhh… Je me sens pas bien… Je suis pas bien dans ma tête… Ahhhhh…
Mais c’est horrible…
Mais n’approchez pas… Je ne vous connais pas …
Vous êtes peut-être de nouveaux infirmiers mais vous ne me touchez pas…
Par contre moi je vais vous démonter la mâchoire… Ou peut-être je vous embrocherais… A moins de vous attacher à une chaise et de vous arracher tous les cheveux un par un.
Sinon je peux très bien vous arracher les ongles. Laissez-moi imaginer quelle torture je vais vous infliger.
C’est le prix à payer pour m’avoir annoncé une très mauvaise nouvelle. Vous ne croyiez tout de même pas vous en sortir indemne ?
Tous ceux qui rentre ici n’en sortent pas indemne, blessés par l’un ou par l’autre.
Il faut bien qu’il vous arrive quelque chose et c’est donc moi qui vais vous infliger votre souffrance. Cela va permettre de purifier votre âââââââme au plus profoooooond.
La douleur sera votre expiation.
Je dois me concentrer.
Vous permettez ? Je vais fermer les yeux quelques instants.
N’en profitez pas pour vous enfuir…
PERSONNAGE 4 DU MANOIR D’ISTAPPOK:
GNA GNA GNA… POUET POUET…
GNA GNA GNA…
AHAHAHAHAH….
Ignace POUETRIE, c’est mon nom. Enchanté !
On est bien installé, n’est-ce pas ? Quel endroit tout à fait charmant…
En plus je suis bien entouré dis donc… Mes spectateurs sont jolis aujourd’hui… Hier ils faisaient tous une drôle de tête… Alors laissez-moi vous taquiner un peu…
GNA GNA GNA… GNA GNA GNA… Hé hé hé hé hé …
Vroum vroum… Vous êtes venus en voiture aujourd’hui. Je vous ai vu arriver. Elles sont belles vos voitures. On y est bien installé, n’est-ce pas ? Quels engins tout à fait charmant… Vroum vroum… Je crois qu’il est l’heure de ma piqûre à la tomate. Je mets une pincée de sel sur la langue pour que cela passe mieux. Je tape trois fois dans les mains et après je marche le long du couloir à cloche-pied. Mais toujours du pied gauche, il ne faut surtout pas mettre le pied droit par-terre sinon c’est perdu ! Ahhahahahahah…
C’est perdu ! Ah ah ah ah ah …
Perdu ! Hi hi hi hi hi hi…
On est bien installé, n’est-ce pas ? Quel endroit tout à fait charmant ! Nous devrions changer de place. Sinoooonnnn… Sinooonnnn…
Sinon… Sinon…
L’écureuil bleu ne sera pas content… Et vous savez ce qu’il fait quand il n’est pas content ? Vous ne savez pas ? Mince… Je croyais que vous pourriez me le dire… Vous ne savez rien alors !
On dirait que vous ne comprenez rien à ce que je vous raconte, pourtant c’est clair ! Je parle français !
AAAAhhhh mais j’ai compris…. J’ai compris… Ah je suis vraiment désolé !
Vous êtes tout nouveau ici ! C’est votre premier jour c’est pour ça ! Remarque quand je vois vos têtes… Je comprends mieux maintenant…
Alors je vous souhaite la bienvenue au manoir d’Istappok… En fait ISTAPPOK c’est un anagramme de PSIKOPAT… Mais rassurez-vous, personne ne l’est ici… Peut-être celui qui se prend pour le docteur Hissi mais c’est tout. Tout le monde, ici, est là pour un petit problème de rien du tout. Au bout d’une semaine nous repartons. Moi je suis là depuis lundi 10 mars 1997. On est vendredi, voyez-vous, cela fait 4 jours que je suis ici pour aider mes prochains. Plus que trois jours et je repars. La semaine aura passé vite.
C’est une belle semaine, n’est-ce pas ? Vous verrez, les gens sont tout à fait sympathiques ici. Vous serez bien installés. Je passerai vous voir tous les matins et tous les soirs. Je vérifierai si vous prenez bien vos traitements. C’est impératif ! Sinon vous ne sortirez pas lundi ! Souhaitez-vous que l’on fasse prévenir votre famille ? Il ne faut pas que vos proches s’inquiètent. Je vais donc prendre votre numéro de téléphone. L’infirmière appellera votre famille. D’ailleurs elle est où l’infirmière ? Je ne l’ai pas vu depuis une semaine. Ah mais oui, je me souviens, elle dort dans un placard, m’a t-on dit hier. La pauvre… Je l’aimais bien…
SOLUTIONS :
Pas évident de savoir ce qui est arrivé exactement à l’infirmière. Elle a été retrouvée ligotée dans un placard du couloir. On vous rassure, ses jours ne sont pas en danger. Mais qui est le coupable, à défaut d’être responsable parmi ces 4 patients internés ? Oui les 4 sont des patients.
Hier, l’infirmière est passée voir Marcel BONGOUR puisqu’elle était très en retard de plus de 5 minutes ce que semble bien se remémorer ce patient qui a la mémoire des chiffres contrairement à son nom qu’il oublie très souvent.
D’ailleurs, il nous apprend que lorsque l’infirmière fut en retard de 6 minutes, il y a plus d’un an, il a fait une crise. Donc un retard de 5 minutes a fait, hier, qu’il ne l’a pas supporté.
Après cette visite, aucun autre patient n’a revu l’infirmière.
Monsieur BONGOUR nous demande d’aller chercher le docteur et non l’infirmière car il savait très bien ce qui était arrivé à l’infirmière. Marcel BONGOUR est donc le coupable.
Génial cette histoire. Tu as un vrai don d’écrivain.
Merci beaucoup Hélène!